Pour son casino, Quinn ne voulait que le meilleur. C’était son château, son empire, et elle voulait le faire à son image : grand, majestueux, merveilleux. Elle voulait passer le pas de la porte et ne faire qu’un avec son ensemble. Il fallait qu’en entrant on puisse savoir exactement qui était la maitresse des lieux et quel genre de reine elle était. Alors, progressivement, elle y ajoutait les décors qu’elle voulait. Un peu de rouge par-ci, un peu de cœurs par-là, quelques joyaux et beaucoup de lumières ; après tout, pour Quinn, tout ce qui brillait était de l’or. Actuellement, sa nouvelle lubie, c’était les fleurs. Elle voulait décorer la salle de bouquets de roses rouges éclatantes, comme celles qu’elle possédait à l’époque dans sa cour à Underland. Mais elle ne voulait pas n’importe quoi. Elle voulait de la qualité. Mieux, de la perfection.

À force de recherches sur tous les sites internet qu’elle pouvait trouver, elle apprit qu’il existait une franchise de fleuristes basée à Londres qui, d’après la plupart des critiques, était « exceptionnelle » et « l’on y trouve tout ce que l’on recherche ». Bien sûr, ce n’était pas le même pays, mais ça n’était pas un problème pour la propriétaire du Queen Of Hearts. Un aller-retour New-York-Londres n’était pour elle qu’une dépense parmi d’autres. Elle serait bien allée au bout du monde si ça pouvait lui permettre d’obtenir ce qu’elle voulait. Alors elle n’a pas hésité longtemps à prendre l’avion jusqu’à la capitale anglaise. Elle prit un taxi pour l’emmener devant l’une des plus grandes boutiques qu’elle avait repérées et entra dans le magasin.

Contrairement à ses attentes, l’endroit ne payait pas de mine. Il y avait des plantes partout, mais pas tellement de plantes rouges. Beaucoup de vert en revanche. Insipide. Elle marcha d’un pas assuré vers l’une des employées et ordonna simplement :

« Je veux dix bouquets de roses rouges. »

La femme en face sembla fâchée d’un tel manque de politesse mais cela n’empêcha pas Quinn de continuer à la jauger de son air hautain. La fleuriste finit par lui présenter quelques compositions florales mais aucune assez bien pour l’ancienne Reine Rouge.

« Non. Je veux des roses rouges, de vraies roses rouges, je veux des couleurs vives, celles-ci sont bien trop ternes ! »

Confuse, l’employée tenta tant bien que mal de garder son calme et l’emmena vers d’autres bouquets de roses. Les fleurs étaient certes grandes et très jolies, mais ça n’était pas assez pour Quinn. Elle n’était pas impressionnée. Et si elle n’était pas impressionnée, alors personne ne le saura, et ça ne l’intéressait pas. Et puis, la couleur était bien trop sombre. Elle voulait quelque chose de bien plus rougeoyant. Alors que la fleuriste continuait son monologue, Quinn perdit patience et l’interrompit en criant :

« NON ! Je ne veux pas de tout cela ! Vous ne voyez donc pas que vos pots manquent d’intérêt ? Qui apprécierait ce genre de roses ? QUI ? Je veux de VRAIES roses, je veux qu’elles soient éclatantes, je veux qu’elles vous brûlent la rétine à force de trop les admirer, je veux du ROUGE, bon sang ! Donnez-moi de vraies fleurs, plutôt que ces espèces de mauvaises herbes ! »

L’employée en face d’elle s’énerva à son tour mais Quinn n’écouta pas un seul traitre mot de ce qu’elle disait. Elle n’avait pas de temps à perdre ici avec ces sottises. De nouveau, elle l’interrompit :

« Laissez tomber, je ne resterais pas ici un instant de plus. Je préfère encore passer le reste de la journée à sillonner Londres entièrement pour trouver mes roses. »

Sur ce, elle tourna les talons et, furieuse, se dirigea vers la sortie.