Impulsif – opportuniste – intuitif– déterminé – direct – rapide – efficace – violent – discret – réservé – introverti – perspicace – mauvais menteur – peu patient – poli – reconnaissant – pragmatique – tricheur – protecteur – curieux – exigeant – réaliste – spontané – un peu de mauvaise foi – téméraire (sauf face aux insectes) – consciencieux – compétiteur – peu scrupuleux.

Il court dans les ruelles étroites de la ville, le souffle court et les joues rosies par l’effort. Au moment de tourner encore au hasard au nouveau croisement qui se présente à lui, il jette un coup d’œil vif par-dessus son épaule pour voir où en est son poursuivant. Il a le cœur qui bondit furieusement en constatant qu’il est tout près – trop près. Alors il reprend sa course folle de plus belle et un rire cristallin et sauvage lui échappe lorsqu’une main se referme solidement sur son épaule. « C’est toi le chat ! » La voix d’enfant dans son dos déclare sur un ton victorieux, et aussitôt William pivote sur lui-même pour traquer son ami d’enfance à son tour. Il court en anticipant les obstacles dans la périphérie de Reggio de Calabre. Il connait le quartier comme sa poche et décide de prendre un raccourci en s’envolant presque lorsqu’il saute par-dessus les escaliers qu’il dévale pour couper la route à sa nouvelle proie.

Au lieu de rencontrer son ami, c’est un homme adulte qu’il percute de plein fouet. Un petit cri de surprise lui échappe, puis une brève excuse murmurée précipitamment lorsque l’inconnu le dévisage curieusement. « William ! N’embête pas le médecin pendant qu’il s’occupe de ton père. » L’enfant pivote pour jeter un regard surpris à sa mère, et lorsqu’il pose à nouveau le regard sur le dit-médecin, il réalise que ce dernier est effectivement penché sur le corps affaibli de son papa secoué par une vilaine toux. Il est trop préoccupé pour remarquer que la chaleur du soleil ne frappe plus sa nuque. Le décor a brutalement changé autour de lui – il reconnait la chambre parentale et se blottit dans un coin de la pièce pour laisser faire le docteur devant lui. Il entend son père grogner quelques mots entre deux quintes de toux – une insulte sévère pour ces produits chimiques qui lui ont empoisonné les poumons toute sa vie. Il l’entend se plaindre et affirmer que ces conneries synthétiques auront sa peau. Avec amertume, le padre annonce que sa triste vie se résumera à n’être rien de plus qu’une victime collatérale de la cupidité des plus grands. Et le cœur du petit garçon se serre alors qu’il s’enfonce un peu plus dans son coin d’ombre en fermant les yeux aussi fort qu’il le peut pour fuir cette funeste prémonition.

Il sursaute lorsqu’il sent une nouvelle main se poser doucement sur lui. L’homme face à lui n’est pas de la famille, mais sa présence est aussitôt rassurante. Il reconnait son protecteur et maître, celui qui lui a tout appris : les techniques de vendetta, d’enlèvement, de trafic de cocaïne, le maniement des armes et le combat au corps-à-corps… « Allez William, tu es prêt. Le boss veut te voir. » Sans hésiter, William se saisit de la main qui lui est tendue pour se relever. Une fois debout, il se découvre plus grand, plus fort aussi – rien à voir avec le petit garçon de 7 ans blotti dans un coin d’ombre. Un coup d’œil autour de lui lui apprend que son environnement a encore changé. Il reconnait sans mal un repère de la Ndrangheta ; la mafia italienne calabraise. L’endroit a des airs de seconde maison pour lui, alors détendu, il ne prend pas la peine de questionner la normalité de cette nouvelle téléportation.

Will et l’homme qui l’accompagne changent de pièce, mais ce n’est pas le boss qui les attend de l’autre côté de la porte. Ils sont à l’aéroport. William jette un regard incertain à son accompagnateur qui lui sourit tristement. « C’est juste le temps de faire profil bas quelque temps. Fais pas ta tête d’enterrement, tu seras bien accueilli là-bas. » William a quand même le cœur serré lorsqu’il donne une accolade à l’autre en lui faisant promettre de veiller sur sa famille pour lui. Puis il se met en route pour New-York. Le passeport qu’il tend à la douane indique qu’il a 25 ans.

Il passe le portique de sécurité et le voilà déjà en ville. The Big Apple. Après un bref regard aux immeubles immenses qui n’ont rien à voir avec sa ville natale, il marche d’un pas pressé le long des docks, animé par le pressentiment d’être attendu. Lorsqu’il pousse la porte d’un entrepôt désaffecté, Louis relève la tête vers lui. Il a le Livre en main et le regard brillant. « Le versement sera fait dans l’heure. » Il annonce avec un air satisfait. William hoche silencieusement la tête, le regard rivé sur le Livre. Au fond de lui, il se demande ce qui pourrait être différent si c’est lui qui tenait cette source de magie. Curieux d’avoir la réponse, il fait un pas vers Louis pour le lui prendre.

Il n’a pas le temps de combler la distance qui les sépare, la sonnerie de son téléphone interrompe brusquement son rêve. Il papillonne un instant des paupières le temps de revenir complètement à lui avant de rouler sur sa droite en grognant. « Ciao, Mamma ? » Il décroche et salue sa mère d’une voix encore endormie en jetant un coup d’œil suspicieux à l’horloge. Il fait encore nuit noire dehors, elle oublie toujours de penser au décalage horaire lorsqu’elle appelle. Mais comment lui en vouloir lorsqu’elle lui parle d’une voix si enthousiaste ? Avec un sourire bienveillant, William écarte le téléphone de son oreille – sa mère hurle toujours dans le combiné comme si elle craignait de ne pas être entendue par son fils à l’autre bout du fil. Elle lui parle d’un colis. « Ah ! Tu l’as reçu ? Ça te plait ? » Il lui parle en italien et rigole doucement lorsqu’elle ne parvient pas à cacher son excitation en le traitant de fou de lui avoir fait un tel cadeau. Ils échangent encore quelques mots et se confient les dernières nouvelles qu’ils ont respectivement eu de Céleste – la petite dernière de la famille. Soudain, sa mère s’inquiète car elle croit l’entendre malade. Le fils rigole encore avant de lui révéler d’une voix douce : « Il est 4h du matin ici maman. » Horrifiée par son erreur, sa mère se confond d’excuses et lui propose de le rappeler plus tard. Lorsqu’il raccroche, il fixe un instant le plafond de sa chambre avec un sourire sur les lèvres, le cœur allégé d’avoir entendu sa mère heureuse. Il s'assure toujours qu'elle ne manque de rien et ne peut pas s'empêcher de la gâter quand il en a les moyens. Il se met à songer au sud de l'Italie qui lui manque parfois et en oublie presque le drôle de rêve dans lequel il était perdu, avec cette curieuse traversée des grands moments de sa vie. Avant de se rendormir tout à fait cependant, il referme l’ordinateur en veille à côté de lui. Il s’est encore endormi en regardant un disney pour se mettre à la page de sa prochaine cible – impossible de rester éveillé devant ces films pour enfants s’il ne s’oblige pas à prendre des notes. Lorsque ce n’est pas la faute au scénario toujours piteusement prévisible, ce sont les chansons qui le bercent. Tant pis, il s’enroule à nouveau dans sa couette en grognant. Il regardera la fin au petit-déjeuner.