Jafar s'était vite habitué à ce nouveau monde, son intelligence et sa faculté d'adaptation lui permirent de d'attribuer des raisonnements logiques à ce qui l'entourait. Ainsi, les voiture, les boutiques de vêtements haute couture, les téléphones qui sonnent, les rues sans arrêt bondées, les conversations incompréhensible et les boutiques d'aliments grillagées, ne l'impressionnaient plus. Mais il devait admettre que ça n'avait rien de charmant. Il préférait les rues paisibles d'Agrabah et les marchés, bien qu'il n'y allaient jamais. Mais pour le coup, le côté reptile de Jafar s'exacerbait. Les serpents aiment les endroits calmes et frais, un donjon par exemple. Pourtant, quelque chose attirait l'ex grand Vizir d'Agrabah, cette ville démesurée, cette fourmilière qui semblaient soumise à des codes précis, cette agitation foisonnante respirant la puissance et la hauteur des bâtiment au moins deux fois supérieure à ceux de sa ville d'origine avait tout d'alléchant pour un sorcier en manque de gloire et de pouvoir. Pendant un instant, l'idée de contrôler la ville prit la place sur la quête de trouver le responsable de la malédiction.

Toujours vêtu de sa tunique rouge et noire, son turban plumé et sa canne à la main, il n'avait pas perdu de son charme. Bien que son accoûtrement soit quelque peu étrange et que les parisiens n'étaient pas des gens insensibles à la différence, certaines femmes le dévisageaient d'un oeil quelque peu gourmants. Son visage avait légèrement rajeunit, sa barbiche étaient toujours là et ses yeux se faisaient toujours autant séducteurs.Pourtant Jafar se dit que, pour l'instant, il était préférable de passer innaperçu. Et pour se faire, autant s'inspirer de la ode actuelle. Il entra dans une boutique masculine où il choisit une une chemise rouge et un gilet d'homme noir qu'il agrémenta d'un pantalon noir et de chaussres de cuirs assorties. Bref, il fit des folies mais au moment de passer à la caisse, il eût bien du mal pour régler ses achats et, perdant patience, il prit sa canne et l'avança vers les yeux du vendeur avec une certaine discretion :
~Vous allez me laisser partir... Et ne cherchez pas à me suivre.
~Je...vais vous laisser...partir et...je ne cher-cherai pas à vous... vous suivre.
Il sourit, satisfait, tournant les talons en fixant tout de même sa cape autour de ses épaules. Il alla trouva un endroit quelque peu intime pour tester à nouveau sa magie. Il voulut faire disparaitre temporairement son ancienne tenue mais il ne reussit qu'à la réduire à l'état d'un portefeuille.
~*Pas mal...*
Il sortit alors, rangeant l'étrange production magique dans sa poche. Tout en marchant, son regard s'arrêta sur une affiche. Un spectacle apparemment.
"Blanche-Neige et les Septs Nains"Un conte de fée ? Jafar s'interrogea, comment ce monde pouvait imaginer les contes de fées ? Avait-t-il un quelconque lien avec son monde à lui ? Ces questions lui suffisaient à tenter d'y aller...
Un peu perdu mais toujours concentré, il s'enquit de trouver le théâtre mais c'était sans compter sur une rencontre qui allait changer quelque peu tout ça.

Le grand Vizir était un peu comme un tigre. Si on le bousculait de trop, il sortait très vite ses griffes. Et si on le bousculait dans la rue, autant vous dire qu'il ne serait pas avare en râles de colère. Par instinct, il attrapa le poignet de la jeune femme et la ramena en face de lui, la malmenant un peu. Mais quand son regard se posa sur elle, les rides étriqués de Jafar s'apaisèrent. Il tenait devant lui une jeune femme magnifique avec une odeur ténébreuse. Les yeux de Jafar se mirent à la dévorer du regard avant de la redresser, elle qui était perchée sur ses talons haut. Sa voix lui était étrangement familière mais toujours est-t-il qu'elle avait une aura de mort, l'accoutrement de la femme fatale par excellence. Elle semblait pressée mais Jafar sentait qu'elle n'était pas comme les autres de ce monde. Son esprit naturellement suspicieux pouvait lui donner cette impression.Il entama la conversation en utilisant sa voix naturellement charmeuse et sensuelle :
~Veuillez m'excuser madame, j'avoue que j'étais quelque peu concentré sur le chemin que je devais suivre, je regrette amèrement de ne pas vous avoir remarquée. Ceci, est une insulte à votre beauté.
Il accompagna ses louanges d'un sourire ravageur. Il la relâcha avant de se racler la gorge.
~Peut être que je pourrais espérer que vous connaissiez le chemin vers le Théâtre Célestin. Je me rends à un spectacle voyez-vous...
Il ricana doucement et s'inclina élégamment tout en prenant la main de son interlocutrice pour la lui baiser délicatement. Une odeur de pomme émanait de ses doigts et Jafar ne pût s'empêcher de sourire de manière narquoise. Son instinct ne le trompait que trop rarement.
~Mais avant toute chose ma chère, quel est votre nom ?  

Le sourire de la jeune femme pénétrait délicatement le coeur de l'homme des sables et il ne pouvait s'empêcher de le lui rendre. Quand enfin il eût pris connaissance de son nom, il haussa un sourcil. S'était-t-il trompé ? Jafar balaya vite cette pensée car il était absolument convaincu qu'il avait raison mais il attendrait le bon moment pour la faire avouer sa véritable identité. Pour l'instant, ils n'avaient pas vraiment le temps de jouer au chat et à la souris d'un point de vue séduction et il fallait qu'ils se mettent vite en route pour rejoindre le spectacle qui allait certainement les réunir. Et pour gagner du temps et conserver l'effet de surprise qu'il voulait procurer à sa comparse, il lui répondit en s'inclinant, pointant le bout de ses doigts vers lui :
~Je suis Assam Arabian, je... je dirige un cabaret oriental.
C'était bien entendu faux mais au moins ça lui donnerait une bonne idée sur ce qu'il pourrait faire dans le monde réel. C'était déjà un bon début.
~Maintenant, si vous le voulez bien ma chère amie, il est temps d'y aller, je pense qu'il serait fâcheux de rater le spectacle, nous aurons tout le temps de nous présenter ensuite, n'est-ce pas ?
Il désigna son bras sur lequel il s'attendait à ce qu'elle s'accroche, tel un vieux couple des vieux films. Satisfait par cette rencontre inattendue, la colère de se savoir prisonnier d'un tel monde s'adoucissait de secondes en secondes. Pendant le chemin où leurs pas s'accélèraient vers le théâtre, Jafar voulut en connaitre d'avantage sur elle :
~Une femme pleine de responsabilités liées à la gestion d'un hôtel...Se pourrait-elle qu'elle s’intéresse à quelque chose d'aussi fantaisiste que l'histoire de Blanche Neige ? Je vois mal une femme de votre carrure s’intéresser à une si frêle princesse !
Il prit un ton quelque peu moqueur, il savait qu'il allait la piquer à vif avec ces simples mots, il voulut sa réaction pour mieux la démasquer le moment venu.

Comme il s'y attendait, elle ne s'attarda pas trop à dévoiler son identité mais un indice se glissa dans sa phrase. "Blanche-Neige et moi c'est une vieille histoire" ...*Inutile ma belle, tu ne parles pas de tes goûts d'enfant...* Il savait bien qu'elle était bel et bien la belle-mère de la prude princesse. Il se contenta de marcher droit devant lui d'un air rêveur. Qui ne dit mot consent après tout ! Et arrivés devant le théâtre, il s'apperçu qu'il n'avait pas de billet. Fort heureusement, il se présenta au guichet et il s'avérait que quelqu'un avait téléphoné pour se désister suite à un empêchement. Tenant sa canne fermement, il pût une nouvelle fois obtenir ce qu'il voulait en hypnotisant discrètement le guichetier. Et c'est avec un sourire en coin satisfait que le Grand Vizir repartit avec un billet tout beau, tout neuf.

Il revînt vers sa comparse avec son élégance naturelle et pénétra enfin dans l'enceinte du théâtre. Jafar fût admiratif pendant quelques instants de la beauté du lieu. Déjà que le hall était surprenant avec son marbre, ses lustres étincelants et les rideaux de velours rouge qui agrémentait nombre de colonnes romaines. Cela changeait bien de l'architecture orientale. Certes, ce n'était pas aussi joli mais cela valait le coup. Dans la salle aux allures d'un amphithéâtre, les sièges rouges rivalisait avec le doré des barrières. Tout était luisant, brillant, scintillant. Quelque chose de royal émanait de la pièce et on l'eut crût à une pièce sacrée, vertigineuse pour sa grandeur. S'installant près de la jeune femme, il ne faisait que regarder en haut, en bas, à gauche et à droite, obnubilé d'apprécier chaque détail de cette magnificence architecturale. Mais un autre spectacle allait s'offrir à ses yeux, elle se déshabilla, se mettant à l'aise et Jafar ne pût s'empêcher de la lorgner un peu, glissant son regard gourmand sur l'ensemble de sa carrure féline.
~Vous rivalisez avec la beauté de cette endroit ma chère.
La mettre à l'aise était primordial s'il voulait obtenir d'elle ce qu'il souhaitait. Il lui sourit alors et caressa sa canne serpent tandis qu'il lui répondit d'une voix de velours.
~Ce qui m'intéresse ? Oh pas grand chose. A vrai dire, je voulais me détendre un peu voyez-vous...
Il laisse planer un petit silence avant de la fixer intensément.
~Mais s'il y a bien quelque chose qui me fascine c'est bien cette Méchante Reine...Elle est d'un charisme impressionnant, ne trouvez-vous pas ?
Il se retînt de lui faire un clin d'oeil, seul un sourire enigmatique se forma sur son visage.

Jafar s'attarda un instant sur le pendentif de la femme. Une pomme croquée, quelle coïncidence ! Il savoura le plaisir de sa découverte dans un silence divin. Les lumières s'éteignirent et les yeux de Jafar brillaient encore dans l'obscurité. Assis dans une posture quelque peu majestueuse, il observa la scène avec une certaine indifférence. Rien n'était vraiment différent de la version qu'il connaissait. Mais depuis qu'il venait de rencontrer la Evil Queen, il était impatient de voir à quoi ressemblait son homologue théâtral. Quand il apparut enfin, Jafar fût surprit, elle n'était pas aussi belle que la femme à ses côtés. Elle jouait à merveille mais il lui manquait ce charme ténébreux qui émanait de sa compagne assise juste à côté de lui. Au moment où la jolie actrice incarnant Blanche Neige croqua dans un son lugubre la pomme empoisonnée, Jafar glissa un regard vers sa partenaire qui entortillait de manière frénétique son pendentif. Elle devait jubiler, être en extase de voir se jouer sur scène, la machination qu'elle avait elle-même orchestré. Profitant de ce moment d'extase, il voulait l'achever lui-même. Il se pencha doucement vers son oreille et écarta une mèche de ses cheveux avant de lui murmurer d'une voix irrésistible :
~L'actrice qui vous incarne ne vous arrive pas à la cheville ma chère Alicia...ou devrais-je dire Evil Queen...
Il laissa ses paroles résonner dans le creux de son oreille, il ne la sentait pas du tout imperméable à son jeu de séduction. Et pour cause, peut de représentantes du mal lui avait véritablement résisté quand on y pense. S'attendant à ce qu'elle tourne sa tête vers lui, Jafar allait l’accueillir par un sourire hautement diabolique et surtout... complice.

Et cela ne manqua pas ! *Prise au piège ma belle !*. Jafar laissa échapper un ricanement discret à entendre sa partenaire lui répondre. Mais il s'attarda aussi sur le message transmis par la pièce. Ici bas, l'on avait donc la volonté de promouvoir absolument le Bien. Finalement, rien n'était véritablement différent du monde Disneyen auquel le ténébreux vizir appartient. Il s'était surpris à serrer le poing devant cette effusion théâtrale. Encore un monde où il fallait se battre et devenir violent pour obtenir ce que l'on voulait. Jafar n'avait jamais vraiment voulu être comme ça bien qu'il y trouve du plaisir aujourd'hui. Il était simplement révulsé de savoir le trône d'Agrabah aux mains du pire des gamins court sur patte. Le Sultan n'avait jamais eu l'étoffe d'un roi, Jafar en avait tous les atours et la jalousie pouvait faire d'odieux ravages.

Jafar redoutait alors la scène de fin et ça n'avait pas raté, la Reine se sentît soudainement lasse de voir sa représentation mourir sous ses yeux. Il posa sa main délicatement sur l'épaule de l'obscure dame dans un geste de reconfort. Froid, sans forcément de sentiment mais on ne pouvait attendre plus de Jafar.
Enfin, il sortirent en silence tandis qu'il suivit Evil Queen sur les quais de Seine. Il s'assit avec elle, toujours dans cette démarche incroyablement impériale.
~Rien ne m'échappe ma chère. Je suis ravi de vous trouver en ces lieux, vous semblez aussi radieuse que dans mon souvenir et le nouveau monde ne semble pas avoir eu raison de vos charmes. Néanmoins, je vois que votre perspicacité répond fort bien à la mienne.
Il caressa sa canne serpent avec délicatesse. Sa barbiche ondulait presque à chacun de ses mouvements de bouche.
~Je ne suis effectivement pas de ce monde mais je suis surpris que vous ne m'ayez pas reconnu.
Il sourit légèrement.
~Je suis Jafar ma chère. Mais reprenons des présentations dénuées de tout artifice et de tout mensonge.
Il prit sa main tendrement qu'il baisa après avoir ronronné pour la séduire d'avantage.