Rencontre du 7e type
 

Hank avait beau venir d'ailleurs, il savait fort bien ce que représentaient les fêtes de fin d'année, et cela ne lui plaisait simplement pas. Les décorations de la ville étaient tellement chargées qu'elles auraient pu éblouir un malvoyant sur place, sans compter que l'atmosphère était aussi électrique que les tentacules d'une méduse. Malheureusement, cela n’assommait pas les gens mais les rendait plus excités et... joyeux que jamais. Oh, il imaginait parfaitement pourquoi. Ils se réjouissaient à l'avance d'éprouver le plaisir de donner, de recevoir, et surtout de passer du temps en famille, ou entre amis. Hank trouvait tout cela surfait et bien mièvre, en vérité, en se cachant certainement à lui-même qu'il éprouvait ni plus ni moins de la jalousie, envers ces gens qui savaient profiter de la vie, ou qui, tout simplement, n'étaient pas seuls. Hank se plaisait à croire que ces fêtes n'étaient de toute façon qu'un amas d'hypocrisie. Les gens faisaient mine de se préoccuper les uns des autres, pendant une brève période, sans doute pour se déculpabiliser d'agir de façon égoïste et individualiste tout le reste de l'année. Ils offraient des chocolats à la fin du mois de décembre, en s'imaginant que cela leur épargnait de prendre des nouvelles des autres, les quelques 364 jours restants.

Ce qu'il détestait le plus, lors de ces festivités, c'est que les rues étaient pleines de monde, et que les gens étaient beaucoup plus avenants que le reste de l'année. Telle dame vous accordait un sourire. Tel homme, ou plutôt beaucoup, vous interpellaient sans arrêt pour vendre les babioles qu'ils avaient en stock.

Vêtu de couleurs sombres, comme à son habitude, Hank affichait un air maussade et constant. Il est inutile de préciser qu'il contrastait fortement avec l'ambiance colorée et joyeuse qui régnait autour de lui. Et pourtant, ce n'était que la moitié du mois de décembre... Soupirant, il continua sa route, se frayant un chemin à travers la foule, non sans crisper la mâchoire lorsqu'un tel le bousculait légèrement... Il n'avait jamais autant regretté sa vie calme et solitaire au fond d'un aquarium américain.

Il sortait du métro lorsqu'il fut abordé par un homme qui semblait maîtriser l'art de l'éloquence. Hank le jaugea rapidement du regard, lui trouvant un air raffiné et avenant qui aurait pu lui plaire, s'il n'était pas naturellement méfiant et aigri. De toute façon, il savait que les gens ne vous abordaient jamais sans raison, ici. Aussi, Hank ne chercha pas même à cacher son ennui, soupirant une fois encore avant de néanmoins écouter ce qu'il avait à dire, tandis qu'il agitait quelques sucreries devant lui.

Il regarda les chocolats d'un air morne, avant d'être interpellé par sa dernière phrase. Ainsi, il s'agissait d'un jeu, qui était censé le couvrir de présents. Pitié... Il y avait encore quelqu'un qui était assez naïf pour croire que les cadeaux tombaient ainsi du ciel ? Il eut étrangement une pensée pour Dory. Sans mentir, Hank était assez tenté de l'envoyer paître, sans plus attendre, mais la roublardise l'attirait, de temps à autres.

▬ Je me réjouis à l'avance de tenter ma chance, dit-il donc, en l'observant.

Quelqu'un qui le connaissait bien aurait sans doute perçu une once d'ironie dans le ton utilisé, mais celle-ci était trop implicite pour un inconnu. Hank se contentait d'observer son interlocuteur, avec un air intéressé, du moins, dans la mesure du possible. Il n'avait jamais été quelqu'un de particulièrement expansif.

▬ Voyons voir. Je choisis celle que je veux ? demanda-t-il, tout en commençant à regarder les différentes sucreries.

Il fit mine de réfléchir, tout en se demandant réellement s'il y avait un espoir pour que cela ne fût pas une arnaque, ou du moins simplement une manière d'attirer l'attention sur des chocolats lambda, qui auraient un prix, de toute façon. Une des papillotes semblait quelque peu être mise en évidence et il se demanda cette fois-ci si son interlocuteur ne cherchait pas à l'induire en erreur. Si tel était le cas, ce serait toujours moins suspect que de lui présenter ainsi la friandise gagnante. Et si cela arrivait, Hank avait de vagues idées de comment réagir... Il haussa légèrement les épaules et sélectionna la papillote, avant de l'ouvrir...  

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Rencontre du 7e type
 

Hank était toujours tenté d'envoyer paître ses différents interlocuteurs, pour une raison ou une autre. Malgré son caractère farouche, il lui plaisait parfois d'essayer de cerner autrui, ou plus précisément, de les avoir à leur propre piège. Si Hank avait eu le temps de découvrir le pot aux roses, d'une façon ou d'une autre, il se serait fait une joie de mettre un coup de pression à Nick. D'une certaine façon, les arnaqueurs faisaient moins fuir Hank que les gens qu'il qualifiait – avec dépit – d'affables. N'allez pas croire qu'il éprouvait la moindre empathie envers cet homme, pour autant. Hank n'avait pas grandi parmi les humains, c'était pourquoi il ne se fiait guère aux apparences, ou du moins, ne jugeait pas son prochain uniquement à cela... Pour autant, cet homme semblait être doté d'une assurance et d'un potentiel côté m'as-tu-vu qui risquaient fort de le contrarier davantage. Naturellement, Nick ne devait guère le prendre personnellement, car Hank trouvait quelque chose à redire pour tout, et tout le monde.

Il allait choisir la friandise miraculeuse lorsque les deux hommes furent interrompus par une mise en garde distincte, et ce malgré le bruit de la foule environnante. Hank leva les yeux vers les silhouettes qui se trouvaient plus loin, et qui les observaient fixement. Parmi elles, il y avait un représentant de l'ordre. La mâchoire de Hank se crispa. Il n'était ici que depuis quelques mois mais son expérience avec l'autorité n'avait jamais été bonne.

Il n'eut guère l'opportunité de se poser la moindre question, ou même de dire quoi que ce soit. Le policier était déjà en train de fendre sur eux, comme un requin sur sa proie. Sans savoir pourquoi, la respiration de Hank s'accéléra. Il aurait donné cher, en ce moment précis, pour être toujours doté de ses talents de caméléon. En moins de temps qu'il en fallait pour le dire, Nick avait détalé, comme un renard qui venait d'entendre un coup de fusil. Hank eut un instant d'hésitation. Et alors, le flic l'interpella à son tour, lui ordonnant de rester immobile. Comment ? La logique aurait voulu que Hank tâchât simplement d'expliquer que, non, il n'était pas le complice de Nick. Mais sa déraison s'emballa. Il ne savait rien du renard. Et si le policier venait pour lui ? Même si ce n'était pas le cas, et qu'il jouait une fois encore la carte de la malchance ; il avait en sa possession assez de médicaments pour attirer l'attention. Or, pour une pieuvre qui avait rêvé de finir ses vieux jours dans un aquarium, il ne désirait désormais plus se faire emprisonner par qui que ce soit. Le centre ne lui avait pas laissé que de bons souvenirs.

Malgré les apparences, seulement quelques secondes s'étaient écoulées entre l'instant où le policier les avait interpellés, et maintenant.

Hank ne réfléchit pas davantage et prit, lui aussi, ses jambes à son cou, empruntant machinalement la même direction que Nick. Avec son membre blessé, il n'était pas aussi rapide que son prédécesseur ; mais le flic était ralenti par la foule.

Hank s'engouffra dans la bouche de métro dont il était sorti, il y a peu. Il était tenté de prendre une direction différente de Nick, dans l'espoir que le flic choisît de pister le renard... Néanmoins, il y avait fort à parier que le policier jetterait son dévolu sur lui. En effet, Hank n'était pas particulièrement chanceux, et, comme dit plus haut, moins rapide. Il lui était de toute façon venu une meilleure idée.

Il se précipita vers le quai le plus proche, dans lequel un métro venait d'arriver, par chance. Hank s'engouffra dans un des wagons, se demandant si Nick l'avait imité, et surtout si les portes allaient se refermer avant que le flic ne les rejoigne...

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