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 :: RP Abandonnés
Histoire du passé ⊹ Clochette F. Tinker
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Lun 3 Juin 2019 - 15:44
Histoire du passé
Désorienté, l'oisillon arraché à son nid ne sait plus où donner de la tête, il voit les barreaux de sa cage s'agrandir et a la naïveté de se croire enfin libre.

Aujourd'hui, Thäleia est cet oisillon. Elle laisse ses pas la guider au hasard dans la bibliothèque, savoure chaque seconde de son errance. Ces plaisirs-là son rationnés. Une heure. C'est ce qu'on lui octroie. Soixante minutes de liberté. Ou presque. On la sort de sa tour uniquement pour l'enfermer dans une autre cage, plus spacieuse. La pratique est astucieuse, la sirène s'y croit presque. Perdue entre les étagères toutes baignées de lumière, elle ne voit pas que de nouveaux murs encadrent ses faits et gestes. Peu importe. Thäleia se satisfait de cette illusion, encore grisé par l'inconnu. De temps à autre, une fenêtre ou une porte attire son regard et elle s'imagine pouvoir s'envoler pour de bon, que seule sa volonté l'empêche de déployer ses ailes. Ici, au moins, elle a l'impression d'avoir le choix.

L’impression.

Car, la crainte l'emporte sur la volonté. Des années d'isolements et de mensonges l'ont fait germer. Bien qu'elle refuse de se l'avouer, le monde, dans toute son immensité, l'effraie. Les portes sont des fenêtres ouvertes sur un extérieur qui ne lui renvoie qu'une image de sa propre solitude. Dans le tumulte de ce nouveau monde, vers qui se tourner ? Personne ne l'attend dehors, si ce ne sont les dangers de la réalité : ceux que Moonbin a pris soin d'inculquer à son esprit ; ceux qui, par flash, lui reviennent au creux de ses nuits. Thäleia y voit un château, des prisons sombres. Des souvenirs fanés et douloureux, trop épars pour lui permettre de comprendre, assez nombreux pour lui inspirer des cauchemars. Elle n'y retournera pas. Du moins, pas seule.

Alors, pour le moment, l’adolescente se contente des allées de la bibliothèque. Elle est censée y déposer des livres, pourtant ce n’est pas vers le comptoir que ses pieds l’ont d’abord conduit.

À sa droite, à sa gauche, les auteurs et les ouvrages défilent sur les rayons, étrangers. AndersenApollinaireAtwoodAusten… Perdue dans cet océan de culture, l'évidence de son ignorance la frappe de plein fouet. Thäleia, elle ne reconnaît rien. Les lettres se font et se défont dans des titres qu'elle ne connaît pas. D'un livre anonyme à l'autre, sa main saute sans se résoudre, hésitante, indécise. Que faire ? La sirène ne veut pas laisser le hasard décider à sa place, elle qui a déjà trop peu d'emprise sur sa vie. Le père GoriotLe vent de nulle partPeter Pan. Un écho familier dans l'inconnu. Elle s'arrête, le cœur en feu, caresse le dos du livre pour finalement le déloger de son rayon. Songeur, son doigt retrace doucement les lettres joliment calligraphié du titre. « Peter Pan… » La magie et la nostalgie s'immiscent dans ce murmure. Comme dans un rêve, Thäleia sourit. Ce livre, ce prénom, ici, entre ses mains. Comment est-ce possible ? Miracle ou coïncidence ? Et si ces pages la guidaient vers ses sœurs ? À cette idée naïve, sa gorge se serre, tandis que, sous son front, questions et espoirs se bousculent. Soudain, Thäleia se surprend à jeter de rapide coup d'œil autour d'elle, persuadée d'avoir été observé dans l'intimité de son bonheur. Ne voyant personne, elle porte l'œuvre jusqu'à sa poitrine et reprend sa marche.

Les secondes défilent, et Thäleia, loin de vouloir se contenter d'un seul livre, n'a pas une minute à perdre. Peter Pan contre son cœur battant, elle s'en va chercher de l'aide avant que le gong ne sonne la fin de son escapade. Du temps pour se laisser aller aux souvenirs, elle en aura dans la chambre.

À l'accueil, une blonde. Thäleia ne lui accorde aucune attention, trop préoccupée par ses pensées. Un court instant, elle hésite. Elle n'a pas l'habitude d'adresser la parole à autrui. Pas de cette manière. « Excusez-moi. » C'est à peine si elle lui jette un regard. Une maigre politesse en guise de salutation, et la sirène se lance : « J'aimerais un renseignement. C'est à vous que je dois m'adresser ? » Sa voix ne trahit rien du doute qui l'habite. C'est d'un geste affirmé que Thäleia pose son sac sur le comptoir, comme si l'endroit lui appartenait, comme si elle faisait ça depuis des années. « Je viens rendre ces livres. » Thäleia fait glisser les ouvrages vers la blonde : Paria de l'amour, Le prix du cœur et Prisonnière de mes désirs. Ces titres s'accompagnent de couvertures tout aussi évocatrices. Une parade d'hommes torses-nues croulant sous leurs propres musculatures, des femmes dévouées à leurs bras, cheveux au vent. Le kitsch lui reste presque sur les mains. « On les a empruntés pour moi. Je les ai trouvés terribles. » Un euphémisme. La sirène n'en ajoute pas plus, ses prunelles brillantes de dédains et la courbe méprisante de ses lèvres en disent assez. Ça lui donne des airs insolents de gamine mondaine. Du haut de ses siècles d'existence, Thäleia n'a pas encore tout à fait conscience qu'ici, la jeunesse de ses traits lui ôte une grande partie de sa crédibilité. « Est-ce que vous auriez quelque chose à me conseiller ? Quelque chose qui ne me donne pas envie de mettre le feu aux livres. » Ou de se crever les yeux pour ne plus voir le monde de mièvrerie que ces ouvrages construisent à coup de paragraphes et de métaphores peu inspirés. Ces hommes et ces femmes, se courant après sur des pages et des pages, toutes aussi invraisemblables que stériles. Ce n'est pas ce qu'elle cherche. Ce que Thäleia veut, c'est ressentir. Réfléchir. Réveiller des émotions que l'ennui et l'exil ne cessent d'engourdir, redécouvrir des parties endormies de son âme. « Pour l'instant, je n'ai trouvé que ce livre. Est-ce que… Est-ce qu'il est bien ? » Peter Pan rejoint délicatement ses collègues sur le comptoir. Sur la quatrième de couverture, on peut lire dans une écriture soignée : Tous les enfants, sauf un, grandissent. Ses mots sont assez pour lui permettre de s'évader l'espace de quelques secondes. Oui, c'est de ça dont elle a besoin.

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Sam 8 Juin 2019 - 7:00

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   Histoire du passé
   Thaëleia & Clochette

L
a tête négligemment posée dans le creux de sa main, les yeux mi clos, Clochette s'ennuyait. Un bâillement après l'autre, elle somnolait et piqua plusieurs fois du nez. Pourquoi n'y avait-il personne aujourd'hui ? pensa-t'elle. Nous étions en week-end, avec un temps à peu prés beau ... Pourtant, un silence religieux régnait à l'intérieur de la Plume Magique. Cela devenait presque angoissant. Toute cette immensité vidée de sa discrète activité. Personne ne passait les grandes portes sculptées de l'entrée. Personne n'arpentait les allées remplies de livres en tous genres. Personne ne lisait calmement sur les tables mises à disposition. Enfin, presque personne. Clochette aperçut vaguement la silhouette d'une jeune femme dans les allées de droite. Elle n'y prêta pas attention. A vrai dire, la fée ne prêta attention à rien ce matin là.

Entre deux absences, Clochette se posa mille et une question sur son avenir. Allait-elle réellement passée sa vie dans cette bibliothèque, à protéger ce trésor de culture et de savoir ? A veiller sur le portail permettant de voyager d'un pays à l'autre ? Elle aimait profondément cet endroit, elle savait qu'Archimède comptait sur elle, mais la jeune femme rêvait d'aventure. Une envie furieuse de voyager grandissait en elle de jour en jour. Une envie de découvrir ce monde qui la fascine depuis son arrivée dans la Vallée des Fées. Elle avait mis suffisamment d'argent de côté pour se permettre un tour d'Europe voire peut être du monde ... un si joli rêve.

Une douce voix cristalline vint sortir Clochette de ses rêveries lointaines. "Oui ..?" répondit-elle en reprenant ses esprits. "Oui tout à fait, je peux vous aider ?". Une jeune fille aux cheveux roux se présenta devant-elle, un visage poupin et des yeux bleus presque transparents. Celle-ci posa son sac et une pile de livres sur le bureau. Des romans tous plus clichés les uns que les autres. Avait-elle vraiment lu tous ces livres ? Visiblement oui. "Terribles". Clochette acquiesça, on ne pouvait pas faire pire que ces romans là. Ou peut être les romans érotiques pour ménagères insatisfaites ...  La jeune rousse souhaita emprunter d'autres bouquins, plus intéressants que les précédents. "Cela dépend de ce que vous aimez lire ? expliqua la fée, Aventure, Fantasy, ou quelque chose de plus terre-à-terre comme les romans classiques ? Dites moi." Sa cliente posa un nouveau livre sur la pile ... Un livre tout particulier ... "Peter Pan". Clochette fit circuler ses doigts sur la quatrième de couverture, sentant chaque lettre en relief de la citation mise en valeur. Un sourire se dessina sur ces lèvres, un sourire plein de douceur.

Après quelques minutes, elle finit par répondre. "Je ne peux que vous conseiller ce livre. Pour tout vous dire, c'est l'un de mes préférés, confia-t'elle avec émotions. C'est l'histoire d'un jeune garçon qui ne veut pas grandir, il vit dans un pays imaginaire avec sa meilleure amie la fée ... Je ne vous en dis pas plus, à vous de découvrir la suite ..." Si elle savait que la fée n'était autre que la personne se tenant derrière ce comptoir ... "Si vous aimez les romans d'aventure, de magie, de sirènes et de pirates, j'en ai toute une liste à vous proposer si cela vous intéresse." C'était quand même plus palpitant que ces romans fleur bleue !

 
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Lun 17 Juin 2019 - 7:56
Histoire du passé
Sourire songeur, main portée sur la couverture, silence contemplateur. Ça ne lui a pas échappé, à Thäleia. Et pour cause, ces gestes font écho aux siens. Une réaction en miroir qui l'intrigue. Curieuses, ses prunelles bleutées scrutent la scène, s'accrochent aux traits et aux détails. Elles glanent des informations jusqu'à dans la moindre mèche de cheveux blonds. Il y a chez cette inconnue, une étrange familiarité, comme une impression de déjà-vu. Souvenirs à moitié perdu au fond des limbes de la mémoire, l'image cherche à franchir les barrières de l'esprit pour se rappeler à elle. Thäleia coupe court à sa contemplation. Fixer, c'est grossier. Fixer, c'est surtout suspect.

Elle écoute, cherche dans les intonations câline un indice que le visage n'a pas su trahir. C'est déroutant, de s'entendre conter le synopsis d'une histoire qu'elle pensait connaître par cœur. « Il vit dans un pays imaginaire avec sa meilleure amie la fée… » Clochette. Le parasite de l'île. Évidemment que son nom se retrouve lié à celui de Peter. Même au-delà des univers, la tique fidèle reste farouchement accroché à sa victime. À ses pensées, c'est tout un monde de vestiges qui s'ouvrent en elle. Au cœur de son trouble nostalgique, Thäleia commet l'erreur de s'oublier un instant. Son masque d'impassibilité se fissure, juste de quoi laisser passer une brève grimace sur ses traits mielleux de petite poupée. Le nez se plisse légèrement tandis que les lèvres s'arquent dans un rictus méprisant. Réflexe d'une autre vie, à peine aperçu, déjà disparu. Clochette. Il y a si longtemps que la sirène n'a pas eu l'occasion de ruminer la haine qu'elle nourrie envers la fée. C'est intemporel, à la limite de l'inexplicable. Ça l'a renvoie à une époque plus simple. Chez elle.

Tout comme ce livre. Les péripéties de Peter sont là, dans ce livre. Comment est-ce possible ? Par quelle magie ces récits, transmis d'une oreille à l'autre par des bouches rêveuses, se sont-ils retrouvés figé sur ses pages ? D'abord, la naïade soupçonne un enfant que Peter aurait fait échouer sur l'île, le temps d'une aventure. Il est aisé d'imaginer un de ces visiteurs éphémères coucher sur papier le souvenir merveilleux de son expédition une fois de retour à la maison. Vite, vite, avant que le temps ne les abîme. Scénario plausible. Seulement, au fond, elle n'en sait rien, Thäleia, et ça la dérange. Il y a trop de choses qu'elle ignore, s'en devient insupportable.

Car l'ignorance mène aux croyances. Et ici, c'est dangereux, d'oser espérer. Thäleia se fait violence pour ne pas tomber dans les excès de l'espérance. Après tout, ce livre se révélera peut-être inutile dans sa quête de réponse. Et peut-être que les impressions familières qu'elle pense deviner chez l'inconnue ne sont que le fruit d'une imagination désespérément seule en quête de réconfort. « Si vous aimez les romans d'aventures, de magie, de sirènes et de pirates, j'en ai toute une liste à vous proposer si cela vous intéresse. » Thäleia acquiesce, la gorge nouée. Oui, c'est ce dont elle a besoin. De mots capables de la transporter dans le passé en un saut de phrase. De souvenirs. De certitude. « J'adorerai. » qu'elle souffle dans un demi-sourire. « C'est la première fois que je viens ici seule. C'est compliqué de s'y retrouver quand on a aucune idée de ce que l'on cherche ou même de ce que l'on aime. » Thäleia s'arrête, craignant d'en avoir trop dit. Loin d'elle l'idée de soulever des questions compromettantes ou d'attirer l'attention sur sa situation. Elle ne sait pas encore ce qu'une adolescente de son âge est censée connaître ou non, n'a aucune idée d'où se trouve la vague frontière entre être normale et être différente. « On a toujours emprunté mes livres pour moi. Beaucoup de romans niais. Un peu de science-fiction. » Mentalement, elle dresse la liste des lectures qu'elle peut qualifier d'intéressante. Celles qu'elle lirait volontiers à nouveau. Une manière comme une autre de paraître moins ignorantes. « J'ai lu 1984 et La Guerre des Mondes. J'ai beaucoup aimé. Les Grandes Espérances, aussi. Mais c'est classique, je suppose ? » Encore une fois, elle n'en a aucune idée. Tant de catégories, de mouvements et d'étiquettes. Ça lui échappe, cette manie qu'ont les humains à organiser jusqu'à leur moindre trait d'esprit. Comme si leur existence n'était déjà pas assez définie. Qu'importe. Elle a d'autres préoccupations en tête pour le moment. « Pardon, si ce n'est pas indiscret… » Une pause. L'hésitation est mimée, la sirène se farde de timidité pour mieux creuser en toute impunité. Une figure d'innocence encourage les confidences, Thäleia le sait. « Qu'est-ce qui vous fait autant aimer ce livre ? Peter Pan, je veux dire. Il a l'air d'être très important pour vous. » Mine de rien, Thäleia guide la discussion, s'écarte toujours plus du sujet initial jusqu'à ne plus se tenir au centre de la conversation. Elle. Les livres. Peter Pan. La bibliothécaire.

@Clochette F. Tinker  Coeur
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Dim 23 Juin 2019 - 9:44

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   Histoire du passé
   Thaëleia & Clochette

L
a demoiselle face à elle sembla songeuse, perdue. Elle osa un léger sourire timide lorsque Clochette lui proposa des livres d'aventures, plus palpitants. Emprunter des livres inconnus sans même connaître ses propres goûts n'était en effet pas chose facile. Clochette pensa aux premiers livres qu'elle avait découverts, il y a bien longtemps. Sur la plage du Pays Imaginaire, elle dénichait souvent des fragments de textes, des bouts de pages parfois déchirés, enfouis sous le sable chaud. Jusqu'au jour où elle découvrit l'Autre Monde et tout ce qu'il renfermait. D'immenses bibliothèques remplies de livres de toutes sortes. Et puis bien sûr, les histoires de Peter Pan racontait par Wendy ... Les histoires représententt tellement de chose, pensa Clochette, elles nous font vibrer, et développent notre imagination. Il ne faut jamais perdre ça. Jamais.

La jeune fée connaissait bien les livres qu'énuméra sa cliente, La Guerre des Mondes ... sacré classique pas forcément fait pour tout le monde. Disons qu'il fallait avoir le coeur accroché et être bien éveillé ! Clochette acquiesca. "Je comprends que vous rêviez d'aventures après avoir lu tout ça, nous allons bien trouver quelque chose." Avant de rajouter un mot, la demoiselle lui posa timidement une question à laquelle Clochette ne s'attendit pas. "Qu'est-ce qui vous fait autant aimer ce livre ? Peter Pan, je veux dire. Il a l'air d'être très important pour vous." ... Elle sentit son coeur s'emballer dans sa poitrine. Cette jeune femme avait-elle sentit quelque chose d'anormal ? Les yeux rivés sur le bouquin, Clochette l'effleura de nouveau de sa main. Elle chercha des mots justes, ne laissant rien paraître sur son ancienne vie. "C'est tellement de souvenirs ..." souffla-t'elle, après un bref silence. "Je ne saurai vraiment l'expliquer. Je connais cette histoire sur le bout des doigts." Clochette retourna le livre pour y admirer l'illustration sur la couverture. Un jeune garçon roux vêtu d'un habit en feuilles y était dessiné entrain de voler, accompagné d'une petite fée au dessus de son épaule ... La jeune femme sourit de nouveau. "Oui c'est vrai, Peter Pan est important pour moi, il fait partie de ma vie ..." Clochette releva la tête, craignant d'en avoir trop dit. Elle changea de sujet. "C'est un livre comme ça qu'il vous faut, expliqua-t'elle rapidement. Un livre qui vous suivra toute votre vie." Oui, c'était ça. Une sorte de madeleine de Proust.

Elle se souvint parfaitement de la nuit où elle découvrit l'Autre Monde en tant qu'humaine, loin de chez elle. Le jour où elle trouva ce fameux livre sur les aventures de Peter Pan. Le choque fut étrange et terrible à la fois. Mille et une questions se bousculèrent dans sa tête. Depuis, elle relisait souvent seule avec Peter toute cette fabuleuse histoire pleine de souvenirs et de magie. Pour ne rien oublier. Pour se rappeler d'où ils viennent, ce qu'ils ont été.

Elle marqua un temps puis sourit à sa jeune cliente. "Vous désirez le lire ? Il n'est pas sur liste d'attente."

 

@Thäleia Mïotysea Cutie
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Ven 28 Juin 2019 - 14:50
Histoire du passé
Une pause. La question trouble. Chez la blonde, Thäleia discerne l'effervescence d'un esprit que la nostalgie submerge. Et son analyse reprend. Profitant de l'attention détournée de la bibliothécaire, la sirène fixe. Encore. L'œil de la naïade insiste, déterminé à percer ce minois songeur et ses secrets. Rien n'échappe à l'impitoyable dissection de la prédatrice, des gestes chargés de souvenirs au silence recueilli, signe que sous ce front penseur, ça s'agite. Cependant, lorsque la blonde reprend la parole, ses réponses sont allusives et la vérité, dissimulée derrière un voile de prudence. Assez pour nourrir des soupçons, trop peu pour les confirmer. La sirène reste sur sa faim. Elle devra se contenter du langage du corps, à défaut du langage des mots. Par chance, celui de son interlocutrice est assez évocateur, tout offert au sciage mécanique de ses iris clairs.

Parce que Thäleia n'a pas détourné le regard, pas cette fois, continue de poser sur sa proie deux billes inquisitrices. « Oui c'est vrai, Peter Pan est important pour moi, il fait partie de ma vie… » Leurs regards se croisent. C'est court, une seconde perdue dans l'infinité, et pourtant, Thäleia, ça l'a frappe. Ces yeux-là, c'est une lucarne sur le passé. Elle y revoit des images d'un temps révolu. Mais surtout, elle y trouve le reflet d'une disparue. Clochette. Sous le monocle de sa découverte, Thäleia ne voit plus que l'évidence. C'est elle. Ses yeux. Son nez. Sa bouche. La fée est là, sous cet épiderme de mortelle. La voir amputée de ses ailes est étrange, mais pas autant que de la considérer dans toute sa grandeur humaine. « Vous désirez le lire ? Il n'est pas sur liste d'attente. » Et elle, l'a-t-elle reconnue ? Visiblement, non. Cette absence de réaction lui arrache une hésitation. Le doute s’immisce. « J'aimerais beaucoup l'emprunter, oui. » Sur ses mots, elle saisit le livre qu'elle commence à feuilleter, entre deux coups d'œil vers la blonde, pour s'assurer que les traits familiers n'ont pas disparu battements, qu'elle ne se trompe pas. Elle doit en avoir le cœur net. Alors, Thäleia ose l'impensable : l'honnêteté. « À vrai dire, je suis curieuse de voir ce que ce livre renferme sur moi. » Qu'elle lâche sans ciller. « Pas grand chose, j'imagine. Faire partie du paysage, ce n'est pas vraiment comme faire partie de l'histoire. » Évidemment. Les sirènes étaient un peuple énigmatique, en marge de Neverland. Leur royaume sous-marin, impénétrable. C'était en parallèle aux autres communautés que leur quotidien se déroulait, insensible aux conflits de l'île. Ou à ses habitants. Rare était ceux capable de les approcher sans subir leurs mesquineries ou leurs jeux enchanteurs.

Et pendant qu'elle parle, sa fouille continue. Ses yeux n'ont le temps d'attraper que quelques mots éparpillés sur le papier. Et des noms. Peter. Clochette. Wendy. Un triolet dans la partition de l'histoire. « C'est quand même étrange, qu'en une éternité d'aventure, ce soit celle de Wendy qui revienne. » Une enfant glande quelque temps sur l'île, et la voilà projetée au cœur du récit. Et de sa mémoire. Pour une raison obscure, dans l'étouffoir qui lui sert de chambre, c'est cet épisode-là, qui habite le plus souvent ses réminiscences du passé. Cela reste tout de même lointain, déformé par une malveillance démesurée, certainement injuste : dans ses souvenirs, Wendy ne parlait pas : elle hennissait, réduite une forme bestiale d'elle-même. Œuvre de la haine et de sa sœur, la jalousie. « Je me demande ce que cette fille avait de si particulier, pour que son séjour sur l'île mérite d'être immortalisé dans ce monde. » Dit-elle en refermant l'ouvrage. « Ça m'échappe. » Elle aurait pu la charrier, céder à de vieilles habitudes et insister sur le fait que la fée n'avait plus été qu'un personnage secondaire une fois que la Wendy était entrée en scène. Mais l'émotion qui l'agite secrètement, l'en empêche.

Depuis son arrivée, Thäleia ne s'est pas un instant cru seule au monde : elle a toujours soupçonné avoir subi le même sort que les autres évanouis de Neverland. Mais au cœur de son enfermement, jamais elle ne s'est sentie aussi isolé et l'immensité de cet univers avait achevé de la convaincre que toutes retrouvailles avec les anciens habitants de l'île étaient impossibles. Un espoir naïf. Même s'il s'agit de Clochette, comme elle est heureuse de s'être trompée !

Aujourd’hui, elle ne veut pas ouvrir d’hostilités, mais parler, comprendre ce qui s’est passé. Derrière les banalités qu’elle lance, impassible, il y a le désir de savoir ce que la fée est devenue, et l’espoir de retrouver dans cette vie, des bribes de son île natale. « Mais j’imagine qu’à toi aussi ? » Une à une, les barrières de la politesse tombent. Le vous disparaît au profit d’un tu plus intime. Plus franc. Sans aucune pudeur, Thäleia a planté ses prunelles dans celle de l’autre, ces mêmes prunelles qui, jadis, avaient l’habitude de toiser la fée depuis les hauteurs scintillante de la lagune. « Tu sais, quand la rumeur de ta disparition a couru au Pays Imaginaire, je ne pensais pas te revoir un jour. Je t’ai cru morte. Vous avez toujours été si fragile, vous les fées. » Le masque est tombé. Plus besoin de faire semblant. Elles se connaissent depuis une éternité, après tout.


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