Il y a plusieurs Jasmine. En fait, ce sont seulement quelques facettes, quelques bribes qui flottent dans les descriptions vagues que le peuple, son père ou ses maints prétendants se sont faites. D'une beauté que même le plus doué des artistes ne saurait lui rendre hommage, on l'a dit hautaine et froide. Détachée du monde et capricieuse, enfant gâtée dit-on. Personne ne s'attarde aux sources de ce bouche à oreille, personne ne s'intéresse à qui elle est vraiment. Enfermée contre son gré, ce n'est pas faute d'essayer de sortir, la jeune femme a grandi seule en compagnie de son tigre, n'ayant pour socialiser que son père le Sultan, beaucoup trop occupé à remplir ses fonctions que pour passer du temps avec elle, le grand vizir en qui elle n'a jamais eu confiance et quelques servants du palais mais sans plus. Sans oublier les jeunes hommes qui ont maintes fois tenté de séduire la belle princesse, mais qui retournaient bredouille, sinon avec leur ego bien affecté par le caractère trempé de la jeune femme. Bien qu'elle puisse agir sous le coup de l'impulsivité, elle n'en reste pas moins fidèle et loyale lorsqu'elle accorde son coeur et sa confiance. Certes, elle a ses standards, ses critères qui lui insufflent une arrogance devant un prétendant trop sûr de lui, mais ce n'est que pour protéger la grande sensible, l'âme en détresse qui rêve de liberté. Elle cherche à rester indépendante, fière de qui elle est, donc nul homme ne peut l'acheter. Attirer son attention est encore quelque chose de difficile, mais pas impossible. Elle n'est simplement pas un prix à gagner.

Déterminée, aux limites du « têtue », elle ne manque pas de débrouillardise et apprend vite, même sous la pression. Elle peut tout faire, lorsqu'elle croit en la cause, que ce soit de se sauver en grimpant par-dessus les murs du palais ou pour jouer les manipulatrices et feindre d'être amoureuse d'un vieux sorcier méchant. La jolie brunette ne manque pas de courage ni de culture. Quoi faire d'autre quand on est enfermée au palais, seule ?

« Moi je viens d'un pays de désert infini, Où les caravanes rêvent et flânent, Où pendant ton sommeil, Les serpents t'ensorcellent, C'est bizarre ça? Mais, eh, c'est chez moi, Quand le vent vient de l'Est, Le soleil est à l'Ouest, Et s'endort dans les sables d'or, C'est l'instant envoûtant, Vole en tapis volant, Vers la magie des nuits d'Orient, Oh nuits d'Arabie, Mille et une folies, Insomnie d'amour, Plus chaude à minuit, Qu'au soleil, en plein jour, Oh nuits d'Arabie, Au parfum de velours, Pour le fou qui se perd, Au cœur du désert, Fatal est l'amour »

Agrabah. Royaume perdu dans les déserts du Moyen-Orient, situé près du fleuve Jourdain. Il s'agit de sa terre natale. L'endroit qui a vu naître cette petite fleur du désert, cette princesse du Moyen-Orient, ce joyau aux yeux de ses parents. Jasmine a été aimée dès le premier jour de son existence, et ce, jusqu'à ses 15 ans, au moment où tout a basculé.

Enfermée depuis longtemps dans l'enceinte du palais, la princesse en eut même oublié la raison. Était-ce réellement pour sa protection ? À quoi bon s'attarder à une enfance passée entre quatre murs, passée à s'occuper comme elle le pouvait, entre la lecture, le flânage avec son fidèle Rajah, les occupations palpitantes lui filaient entre les doigts sans qu'elle n'eut pu en vivre une seule. Le dernier passe-temps qui occupait son temps était les parades des prétendants. Moments brefs, mais très divertissants pour la demoiselle qui crachait son venin, avec toute la classe d'une princesse et les dents d'un tigre, sur ceux qui tentaient de gagner son attention avec maints cadeaux. Comment pouvaient-ils aussi ignorants sur l'art de séduire une jeune femme qui a déjà tout ce qu'elle demande ? Prenant à coeur leur éducation, ou pas, Jasmine se faisait un plaisir de les renvoyer d'où ils venaient, sans demander son reste, au grand désarroi de son père qui aurait tant aimé que sa fille trouve un compagnon. Jasmine n'en voulait pas à son père. Elle connaissait ses motivations, celles du sultan et celles du père, qui s'entrechoquaient toutes et lui mettaient la pression. Mais la belle suffoquait déjà sous la contrainte de l'emprisonnement. À quelques jours de ses seize ans, il en fut assez. Décidée à se marier par amour et non pas pour la loi, déterminée à ne pas terminer sa vie enfermée dans ce palais et encore moins enchaînée à un mari idiot, elle prit la décision de se sauver. Fuir dans l'idée de ne pas décevoir son père publiquement par son refus continuel de se marier, saisir sa chance d'être enfin libre.

Du moins, c'est ce qu'elle croyait. Au petit matin, la demoiselle se retrouva sur la place du marché, ses habits bleu ciel couverts par une épaisse robe brune, sa tête recouverte d'un châle pour la maintenir dans l'anonymat. Les différentes odeurs venaient titiller ses narines, les couleurs éclatantes de tous ces tissus suspendus et ses bijoux brillants sous les rayons du soleil éblouissaient la jeune femme. C'était agité, c'était animé. Cela la comblait. On lui adressait la parole sans la connaître, on essayait d'attirer son attention comme si elle était n'importe qui, une simple cliente flanant dans les rues du royaume. Ce à quoi la jeune femme ne s'attendait pas dans un tel tourbillon d'animation, c'était de voir ce jeune enfant, couvert de poussière qui se languissait des pommes sur l'étalage près d'elle. Ne songeant pas une seconde aux conséquences, n'ayant qu'en tête de rendre service à ce petit bonhomme qui semblait seulement incapable d'atteindre le fruit délicieux, elle lui en tendit un et se retourna. Ce n'était pas sans risque, étant donné que telle une voleuse, elle se retournait sans payer. C'est alors que le marchant s'empara de sa main et la menaça de lui couper si elle ne payait pas. Ayant passé sa vie dans l'enceinte du palais, comment pouvait-elle savoir comment le monde fonctionnait réellement ?

Comment aurait-elle pu anticiper l'arrivée de ce jeune homme ? Alors que le cimeterre allait s'abattre sur son frêle poignet, il arrêta l'élan du furieux marchand et se mit à raconter des mensonges. Des mensonges ? Non, simplement un moyen de la sortir de là avec tous ces morceaux. Jasmine, comprenant bien vite la situation, ne se fit pas prier et entra dans le jeu. S'incliner devant un petit singe l'appelant sultan et saluer un chameau comme s'il était le docteur... la demoiselle peinait à se retenir de rire. C'était la chose la plus farfelue qui lui avait été donné de faire malgré tous les risques qu'ils ont encourus avant de prendre leurs jambes à leur cou. Ce jeune homme avait vraiment quelque chose de différent. Alors qu'ils passaient un bon moment, assis dans son chez lui, qui n'avait rien à voir avec son chez elle, ils furent interrompu par la garde royale. Croyant qu'elle venait pour elle, ou pour lui, ils ne firent ni une ni deux et se jetèrent dans les rues, espérant pouvoir fuir. Ce ne fut pas long qu'ils capturèrent le jeune homme. Ayant une dette envers celui-ci, Jasmine n'eut le choix que de dévoiler son secret et de faire usage de son titre de princesse pour leur donner l'ordre de le relâcher. Malheureusement, l'ordre d'arrestation venait de Jafar. Ce n'était pas assez pour la freiner, loin de là. Il ne lui était pas désagréable de le confronter. De retour au palais, elle fila chercher le grand vizir, réclamant des explications et sa libération immédiate. Le choc qu'elle eut lorsqu'il lui annonça la décapitation du jeune homme, du quel elle ne connaissait même pas le nom. Effondrée, la jeune femme s'enferma dans sa chambre à double tours. Comment supporter la peine du seul être du quel elle avait pu se rapprocher, ne serait-ce que quelques minutes, qui avait pu toucher un peu son coeur par leur différence pourtant qui leur donnait des points communs.

Jasmine était revenu au point de départ. Au palais, avec un poids de plus sur le coeur. Que pouvait-elle y faire ? Ne désirant pas s'apitoyer sur son sort plus qu'il n'était nécessaire, elle reprit ses habitudes, errant dans les couloirs du palais, passant des heures allongés dans la cour. Quelques jours après, alors qu'elle ne cessait de ressasser les événements du marché, un bruit sourd vint à son oreille. Un léger tremblement parcourut son corps, mais aussi les murs du palais. Curieuse, elle se leva et se précipita au balcon attenant à ses quartiers. Une délégation. Une énorme délégation s'avançait vers la cité, se frayant un chemin au travers de la foule d'habitants venus voir cette perturbation exubérante. Musiciens, acrobates, danseuses, animaux, chars allégoriques et naturellement... un prince. Quoi que ce fut une parade poussée à un niveau qu'elle n'avait jamais vu encore, d'habitude ses prétendants se présentent sur un cheval de race, avec leur garde rapprochée et leurs gens, suivis de leurs cortèges remplis de cadeaux, mais là, c'était impressionnant. Elle regarda un moment, intriguée par autant de mise en scène, jusqu'à ce qu'elle perdit intérêt. Un autre insolent s'amenait. À quoi bon ? Il serait comme tous les autres. Sans se presser, sachant que son père la ferait chercher, elle prit la direction de la grande salle, où son père devait accueillir ce prince d'elle ne savait où encore. Un sourire tendre effleura ses lèvres. Son père serait bien le premier impressionné et complètement subjugué par ce spectacle. Le connaissant il sera emballé et s'empressera de la pousser dans les bras de ce dernier. Son sourire s'effaça à cette idée. Déjà blasée, elle souleva le voile qui lui permettait d'accéder à la salle et retrouva non pas seulement son père, mais Jafar et le prince Ali blablabla entrain d'argumenter sur qui avait raison concernant ses goûts. Choquée, la jeune femme les interrompit. Le sang bouillait à ses oreilles autant qu'était vive la brûlure de l'offense dont elle était victime. Trop. C'en était trop. Comme pouvaient-ils tous trois parler en son nom, ainsi décidé de son futur ?

Elle n'est pas un prix à gagner !

Déçue, insultée, outrée d'un tel comportement, Jasmine se retira dans ses quartiers. Elle refusa de voir qui que ce soit. Ne serait-elle donc jamais libre de choisir ? N'avait-elle même pas le droit de décider qui était à lui plaire et qui ne l'était pas ? De rage, elle jeta un ou deux coussins de part et d'autre de la pièce avant de s'effondrer sur son lit, la tête de Rajah près de la sienne, prêt à partager sa peine. La nuit tomba. Personne ne se présenta à sa porte. Bien, voilà qui était une bonne chose. Elle fit sa toilette, tranquillement, en profita pour se détendre.

Une voix. Rajah se redressa et s'élança dehors. Hésitante, ne sachant comment quelqu'un aurait pu atteindre la balustrade de son balcon par l'extérieur, elle le suivit. C'est surprise qu'elle découvrit le prince Ali, perché sur la balustrade, tentant de dissuader Rajah de lui prendre une bouchée. Étrangement, son attitude lui rappela le jeune homme du marché, et un élan d'espoir s'alluma dans le coeur de Jasmine. Jusqu'à ce qu'il nie être le dit jeune homme. Dépitée, elle se replia sur elle-même, jusqu'à entendre cette absurdité. Ponctuelle ? Quel genre de prince séduit avec ce genre de compliment ? Mais il lui avait ouvert une porte, donné une opportunité de le remballer une fois pour toute. Cependant, malgré son ferme rejet, il la menaça de sauter du balcon. Jasmine ne voulait peut-être pas de lui, mais pas au point qu'il s'enlève la vie sous ses yeux ! C'est à sa grande surprise que sa tête réapparue. Intriguée, elle s'approcha et découvrit un tapis volant, sur lequel se tenait debout Prince Ali. Quelle merveille. Elle peinait à en croire ses yeux. Il lui offrit de faire un tour. Tentée, elle hésita tout de même. Il se pencha alors, et lui demanda.

Vous me faites confiance ?

Elle n'en crut pas ses oreilles. Elle sut alors que son intuition était la bonne. Ce jeune homme était bien celui du marché ! Il était vivant. Il était devant elle. Elle ne se fie pas prier une seconde fois et le rejoignit sur le tapis. Cette nuit-là, fut magique. Quoi qu'elle dut le rabrouer un peu de lui avoir menti, elle passa un moment des plus inoubliables. Il lui montra littéralement le monde. Ce monde qui l'attire tellement. Son coeur se serra quand il la déposa à ses quartiers. Mais se gonfla aussitôt suite au baiser. Était-ce ça, l'amour ? Un peu plus tard, son père lui rendit visite avec l'annonce des plus terrifiantes. Il la promettait à Jafar ? Ce vieux et horriblement sinistre homme ? Comment pouvait-elle accepter ? Elle s'empressa donc de lui annoncer à son tour qu'elle avait choisi Ali. Jafar tenta de s'interposer, mais Ali vint rompre l'ensorcellement du sorcier sur son père. Comblée, la jeune femme se jeta à son cou sans trop réfléchir, guidée par cette émotion nouvelle qui naissait dans son coeur.

Les jours qui suivirent furent destinés à la préparation de la cérémonie d'annonce du fiancé de la princesse. Contre toutes attentes, cela dégénéra. Jafar revint malgré les avertissements du sultan. Il revint non pas seul, mais bien accompagné d'un génie !? La véritable identité d'Ali lui fut révélée... elle avait eu raison. Il s'agissait bien d'Aladdin, le jeune homme du marché. Qu'à cela ne tienne, cela ne changerait rien. Son coeur se brisa quand elle le vit disparaître dans cette grosse tour décrochée du palais.

Des chaînes. Encore des chaînes ! Cette fois, elles étaient bien matérielles, bien accrochées à ses poignets. Outrée, elle tenta de résister aux exigences de Jafar. Le sentiment de répugnance qu'elle avait à son égard ne cessait de grandir. Il malmenait son père et osait la tenir captive et à son service. Comment faire pour s'en sortir ? Le génie n'était d'aucune aide. Pire encore. Il allait devoir répondre au voeu que Jafar venait de formuler. Elle devrait tomber amoureuse de lui. Vraiment ? Impossible ! Pourquoi ? Non ! Effrayée de devoir être soumise à un tel sort, la jeune femme se recroquevilla sur le sol. Le génie se mit alors à déblatérer elle ne sait qu'elle règle, mais cela fut assez pour distraire Jafar. Au-dessus de leur tête, Aladdin. Encore une fois, ce fut Aladdin qui vint à son secours. Pressée à lui venir en aide, la jeune femme put à nouveau dévoiler ses talents d'actrice. Feignant d'avoir succombé et d'avoir subi le sort du génie, elle s'évertua à distraire le sorcier, laissant à Aladdin le champ libre pour la lampe. Cela aurait marché si le reflet du jeune homme n'avait pas miroité sur la couronne de la jeune femme. Elle était même allé jusqu'à l'embrasser. Embrasser Jafar. Décidée à ne pas le laisser gagner et que ses efforts soient vains, elle l'avait embrassé quand même, elle se jeta sur lui, puis tenta de se saisir de la lampe. Malheureusement pour elle, il lui jeta un sort et l'enferma dans un sablier. Elle étouffait. Encore une cage. Encore une prison.

Elle se réveilla. Son corps la faisait souffrir. Il faisait noir. Mais elle pouvait respirer. Lentement, elle se passa les mains sur le visage, puis les épaules, jusqu'à faire une totale palpation de son corps. Elle était en un morceau, n'avait que des plaies mineures et des courbatures. L'air n'était pas le même que chez elle. Il faisait froid. Elle grelotait. À tâtons, elle chercha à se lever, prenant appui sur le mur. Il lui semblait être dans une chambre, puisqu'elle y trouva un lit. Ainsi qu'une toilette. Et une douche. Un tout-inclus quoi, mais dans l'espace le plus minimal possible. D'un pas chancelant, elle se hissa sur le lit. Et elle attendit.

Elle ne savait combien de temps elle avait passé dans cet endroit. 1 an ? 2 ? 3 ? Plus ? Elle avait cessé de compter les jours. Elle se contentait de manger les repas infectes qu'on lui amenait pour survivre. Sa seule compensation ?La demoiselle qu'elle avait rencontré lors d'une des quelques sorties dans l'établissement auxquelles elle avait droit. Avec cette dénommée Judy, elle avait décidé de s'enfuir, elles et une connaissance de Judy. Ce fut grâce à Judy qu'ils purent s'enfuir. Enfin. Elle sentit poindre une lueur d'espoir. Elle allait pouvoir sortir. Voir le monde dans lequel elle se trouvait depuis maintenant 5 ans. Bonjour New-York.