Rouky trépigne. Le commissariat n’est plus qu’à quelques arrêts de bus et il a du mal à tenir en place. C’est peut-être un rêve qui va se réaliser bientôt, en tout cas, il veut vraiment y croire.

Depuis qu’il est humain, il a appris qu’avec sa nouvelle liberté viennent aussi quelques complexités, des responsabilités de vie en société qu’il était bien loin d’imaginer du temps où il avait encore quatre pattes et un museau. Désormais, il faut se trouver un travail pour gagner de l’argent, pour pouvoir survivre, car il ne peut pas chasser lui-même sa nourriture dans la grande ville, il doit aller se la procurer déjà toute faite dans ce qu’on appelle des supermarchés. Or, il ne peut en avoir qu’en échange d’argent, mais l’argent ne pousse pas sur les arbres, il faut le mériter pour en avoir. Mais même avec beaucoup de volonté, ce n’est pas très facile, car pour travailler, il faut déjà réussir à trouver quelqu’un qui a besoin de travailleurs, et ensuite il faut bien correspondre à toutes les attentes. Il ne s’était jamais rendu compte à quel point la vie d’humain était compliquée en regardant Amos. Est-ce que lui aussi, a dû galérer avant de trouver sa place dans le monde du travail ? Rouky en doute. C’est comme si son ancien maître était simplement né pour être chasseur.

Lui aussi, il aimerait bien chasser son gibier lui-même et peut-être même en vendre une partie ensuite pour avoir de l’argent en plus, mais à Paris, ce n’est pas la peine d’y penser. Il faudrait qu’il s’éloigne dans un lieu où la chasse est autorisée, mais il n’a certainement pas envie d’abandonner Rox, surtout alors qu’il vient à peine de le retrouver. Alors, il se débrouille autrement. Jusque-là, il gagnait quelques sous en proposant des services de dog-sitting dans le quartier, puis un peu plus tard de dressage canin. Passer des heures entières entouré de chiens est déjà une récompense en soi, il pourrait le faire même gratuitement, mais s’il peut en profiter pour avoir de quoi s’acheter à manger en échange, c’est encore mieux.

Mais quelque part, il a toujours senti avoir besoin de plus. Plus d’action, plus d’adrénaline, plus d’enjeu. Dresser des chiens pour les demandes du quotidien, c’est bien, mais ce n’est pas comme dresser un chien de chasse. Il aimerait leur apprendre ce qu’il a appris, savoir comment traquer, savoir quand attaquer, savoir quand intimider, mais ce n’est pas ce qu’attendent ceux qui font appel à ses services. Et puis, un jour, alors qu’il regardait un film policier à la télévision, il a trouvé sa vocation. Il y a des chiens dans la police. Des chiens qui aident à démasquer les criminels, à attaquer les méchants, à protéger les gentils. Des héros. S’il était encore sous son ancienne forme animale, il aurait aimé en faire partie. Or, là où il y a des chiens, il y a des humains pour les dresser et les accompagner. Pour Rouky, c’est tout ce qu’il faut pour former son métier idéal. Ce jour-là, il a su qu’il allait devenir maître-chien policier.

C'est ainsi que, dès le début de l'année 2024, l'ancien chiot a travaillé dur comme fer à l'école de police pour obtenir son diplôme afin de se spécialiser ensuite comme maître-chien dans la brigade canine. Grâce à Clawd, l’ami d’Oliver, qui a travaillé un temps dans la police, Rouky a pu obtenir un contact d’un de ses anciens collègues et a réussi à se servir d’un téléphone pour l’appeler. C’était un peu bizarre, de parler à un appareil plutôt qu’à une vraie personne en face-à-face, mais il s’est débrouillé plus ou moins pour convenir avec cet Auguste d’une date et d’un horaire où ils pourraient se rencontrer. Avec l’aide de Rox, il s’est également fait un CV pour lister toute son expérience avec les chiens et pour faire bien semblant d’être un humain depuis la naissance. Bien sûr, son meilleur ami a dû se charger de la rédaction à sa place, car même si Rouky a appris les bases de la lecture et de l'écriture depuis son arrivée à Paris, il a encore du mal à construire des phrases sans faire de fautes. Au moins, la patte du renard rendait le tout plus agréable à lire que s’il s’en était chargé lui-même.

Le jour venu, il s’est habillé du mieux qu’il le put, avec une jolie chemise car il paraît que cela fait plus professionnel, puis il a embarqué son CV et s’est rendu au commissariat en bus. C’est donc avec une impatience mal contenue qu’il accélère le pas jusqu’aux portes vitrées du poste de police, excité à l’idée de pouvoir gagner son argent ici. Il se dépêche d’avancer jusqu’à l’accueil, pose son CV devant lui et se présente avec enthousiasme :

« Bonjour ! C’est moi, Rouky, j’ai un rendez-vous avec Monsieur Auguste, euh… Auguste O’Connell. On s’est parlé dans le téléphone. »

Il a envie de tout déballer, de lister ici et maintenant toutes les raisons pour lesquelles il faut absolument l’engager dans la brigade canine, mais il s’efforce de garder son calme, du moins autant qu’il le peut. Après tout, il n’a encore jamais vu Auguste, alors ce n’est peut-être même pas à lui qu’il vient de s’adresser. Il préfère attendre d’être sûr qu’on soit prêt à l’écouter pour parler, être discipliné, cela fera sûrement une meilleure impression.

Le violon commença à faire résonner une lente et longue plainte amoureuse.

Écouteurs dans une oreille, l'autre alerte au moindre son, je me laisse cependant emporter par la musique. Je ferme les yeux, tout en continuant de taper sur mon clavier. Je ne me préoccupe pas encore des fautes que je risque de faire, la lecture automatique de mon ordinateur se chargera de corriger ces dernières. Cet appareil a été adapté à mon handicap, me permettant de continuer à travailler pour la police malgré ma cécité. Je regrette profondément de ne pouvoir aller sur le terrain, car c'était ce qui me faisait vibrer, ce qui faisait battre mon coeur. Mais je dois payer mes impôts, vivre et faire vivre mon Maurice, alors j'ai accepté ce poste dans l'administration. C'est dégradant à mes yeux, mais je peux continuer à porter l'uniforme et à recevoir une solde mensuelle. C'est déjà ça.

J'entends des bruits de pas et je retire mon écouteur, sachant que ce devait être pour moi. J'entends un : Auguste, c'est pour toi, c'est ton rendez vous de 11 heures. Oui, en effet, tu peux l'envoyer dans le bureau Alex. Merci. Les pas s'éloignent et j'en profite pour arranger rapidement ma tenue, mes cheveux, fermant le bouton de mon polo. Je lâche un petit soupir et attends tout en changeant de dossier sur mon ordinateur. Un entretien d'embauche, rien que ça, mais pas pour un futur policier, car on n'intègre pas notre institution comme ça. Ce serait apparemment un expert en espèces canines. Voyons donc cela.

Le jeune homme entra donc après avoir été introduit par Alex. Ce dernier prit congé et je dis alors : Rouky Slade, c'est bien cela ? Asseyez vous, je vous en prie. Je suis Auguste O'Connell, c'est moi que vous avez eu au téléphone. Je me lève pour lui serrer la main, tendant volontairement la main dans ce que je suppose être sa direction avant de me rasseoir. Je le préviens d'emblée : Ne vous formalisez pas si je ne vous regarde pas directement. Je tends la main pour récupérer son CV et je le scanne rapidement avant de le poser devant moi. Je branche un écouteur sur mon pc, qui se chargea de me lire son CV scanné. Ce dernier eu un peu de mal, car les écritures manuscrites n'étaient pas son fort. Je gromelle : Excusez moi, cette technologie n'est pas encore au point... Je lui aurais bien demandé de me lire son CV mais j'ai peur qu'il en profite pour me mentir afin de se glorifier. Je vais donc faire sans, et Alex me le lira plus tard.

Je dis alors, avec un sourire : Vous êtes une de ces personnes qui vient d'un autre monde, n'est ce pas ? Ce nom est loin de m'être inconnu et, pour tout vous dire, il a bercé mon enfance. Je reprends mon sérieux et dis : Bien. Alors vous postulez pour devenir notre expert en espèces canines. Je pense deviner pourquoi mais pouvez vous me donner vos motivations ?

Rouky s’impatiente tandis qu’on l’accompagne jusqu’à une porte, sur laquelle il peut lire le nom de l’homme qu’il est venu rencontrer. Auguste O’Connell, c’est bien lui. À partir de maintenant, il sait que tout se joue. C’est ce qui va déterminer si oui ou non, il pourra travailler avec les chiens de la brigade canine. Il n’a pas peur, cependant - ce n’est pas de l’anxiété qui secoue son ventre à ce moment, mais de l’excitation. Sa vie prend un tout nouveau sens et il a hâte de voir ce qu’elle lui réserve. Mais d’abord, il doit faire bonne impression.

L’homme qui le reçoit l’invite à s’asseoir et, même s’il a du mal à rester en place, Rouky s’exécute. Il se présente comme Auguste et l’apprenti policier hoche la tête, reconnaissant effectivement la voix qui lui a parlé dans le téléphone quelques jours plus tôt. C’était tout de même bien mieux de pouvoir se parler en face à face, il n’a jamais beaucoup trop aimé devoir s’adresser à un petit appareil rectangulaire et ne pas pouvoir visualiser la personne à l’autre bout. Mais, ce n’est peut-être pas le cas d’Auguste car ce dernier ne prend même pas la peine de le regarder directement. Ce n’est que lorsqu’il en fait la remarque que Rouky comprend qu’il doit être aveugle. Il connaît ça, il a déjà croisé quelques chiens guides en se baladant, il trouve d’ailleurs leur travail très admirable. Mais ce n’est pas le sujet du jour, car ceux qui l’intéressent actuellement sont les chiens policiers. Auguste pose son CV sur une machine puis branche un écouteur à son ordinateur pour l’écouter. S’il avait su, Rouky lui aurait fabriqué une version audio directement, ça aurait même été plus simple pour tout le monde, d’autant plus que comme le policier l’indique, la machine n’est pas très fonctionnelle. Il espère quand même que ça suffira, ce serait dommage de rater son entretien pour si peu.

Rouky s’attend à beaucoup de questions, il a pris soin de s’entraîner à répondre à quelques interrogations qu’on pourrait lui poser en entretien avant d’y être ; mais celle qu’Auguste lui pose en premier après avoir terminé d’écouter son CV, il ne l’a pas vue venir. S’il vient d’un autre monde ? Il vient même d’une autre espèce animale, mais Rox lui a dit de ne surtout pas le dire à ceux qu’il ne connaît pas, parce que ça peut être dangereux. Cependant, là, ce n’est pas lui qui en a parlé, et il est quasiment certain que ce n’est pas sur son CV, il l’a relu plusieurs fois avant de le donner. Un peu déstabilisé, il ne sait pas trop comment répondre.

« Euh.. On a le droit de dire ça ? »

C’est une vraie question - Rox lui a dit que non, mais Auguste n’est peut-être pas au courant qu’il ne faut pas. Mais s’il lui en parle, c’est qu’il a le droit d’en parler aussi, non ?

« J’étais un chien, mais ça fait longtemps, je suis humain maintenant. Mais toi aussi, tu viens d’un autre monde ? T’étais un animal ? »

Il ne s’attendait tellement pas à cette discussion qu’il en a oublié de garder un ton professionnel. Il s’en veut un peu, ce n’est pas très bien, on lui a pourtant dit de vouvoyer ses supérieurs, surtout lorsque ceux-ci sont capables de décider de son avenir. Bon, il doit se reprendre. Il n’est pas en train de converser avec un ami, il est ici pour montrer son sérieux et sa détermination. Aussi, quand Auguste lui demande ses motivations, il répond distinctement :

« Je me suis toujours senti très proche des chiens. » Maintenant qu’il venait de lui dire qu’il en était un, cette introduction semble particulièrement inutile, mais c’est ainsi qu’il l’a révisée. « Je les comprends et ils me comprennent, j’ai une communication très aisée avec eux, quelque soit leur race. Comme vous pouvez le li… enfin l’écouter sur mon CV, j’ai été dresseur canin pendant quelque temps et j’ai toujours eu des expériences très satisfaisantes avec eux. Mais j’ai également une volonté de me placer au service de la population, c’est pourquoi je suis entré dans les forces de l’ordre. Devenir maître-chien au sein de la brigade canine me permettrait de lier ces deux objectifs de vie. »

Ce discours, il l’a répété la veille, surtout pour être sûr de réussir à exprimer ses pensées sur un ton professionnel qui passerait bien en entretien. Car dans le fond, tout est vrai : sa proximité avec l’espèce canine, son aisance dans le dressage, sa volonté de devenir policier. Il le sent au fond de lui, il est exactement là où il devrait être et si cet entretien se révèle finalement être un succès, il aura décroché le métier de ses rêves.

Je l'ai destabilisé.

Zut, ce n'était pas mon intention. J'ai tellement l'habitude de croiser des gens venant de mondes fictifs que le simple fait de me trouver en leur présence ne me dérange pas, et cela ne m'étonne plus. Cela explique mon attitude neutre et bienveillante lorsque je pose la question à ce jeune homme au prénom qui me rappelle ce chien de chasse d'un dessin animé de mon enfance. Il me réponds d'abord par une question, avant de m'avouer qu'il avait été un chien par le passé. Il se permit de me tutoyer et il me demanda si je venais aussi d'un autre monde et si j'étais un animal. Je laisse échapper un petit rire et je réponds : Non, je suis né dans ce monde, mais j'ai déjà croisé plusieurs personnes qui étaient comme toi. Et je suis tombé amoureux de l'une d'entre elle, mais c'est une autre histoire.

Je demande alors ses motivations pour travailler en tant qu'expert canin. Naturellement, s'il était un chien avant, il n'y a pas de doute sur le fait qu'il saura mieux que quiconque interagir avec eux, je n'ai pas de doute là dessus. Il me dit qu'il les comprenait et que eux le comprenaient. Alors que j'écoute la retranscription de son CV, il me dit qu'il avait déjà été dresseur mais qu'il souhaitait  se mettre au service de la population et c'était pour cela qu'il était devenu policier. J'hoche la tête et, après un court instant, je lui dis : Vous savez vous montrer convainquant. Pour ma part, je ne vois pas d'inconvénient à vous embaucher. Il faudra cependant faire vos preuves sur le terrain pendant une période probatoire d'environ six mois. Vous serez mis à l'épreuve, vous allez devoir réagir face à des situations difficiles qui concernent des chiens. Nous avons énormément de cas de vols, de disparitions mais également de maltraitance et d'abandons. Il ne s'agira hélas pas que d'interagir avec eux, il faudra parfois enquêter sur des corps de ces pauvres animaux... Je relève la tête vers lui et demande : Vous sentez vous prêt pour cela ?

Je le laisse réfléchir à ma question et, tout en me levant et en prenant son dossier, je lui dis : Suivez moi. M'aidant de ma canne, je me dirige dans le couloir vers notre petit coin extérieur, aménagé pour les pauses et les barbecues. Maurice m'y attends, sans doute confortablement installé dans un énorme coussin que mes collègues, attendris par sa bonne bouille, avaient payés de leur poche. Ils aimaient caresser le pelage de mon énorme Saint Bernard tout en prenant un café. J'entendis que Maurice relevait la tête et je dis : Voici votre premier défi. Si vous parvenez à vous entendre avec ce chien, vous ferez partie de notre famille. Il dit qu'il pouvait comprendre les chiens. Je suis curieux. Sera t'il capable d'apprendre des choses venant de Maurice, sachant que je n'ai précisé ni son nom, ni l'identité de son maitre ?

Rouky est rassuré d’entendre Auguste échapper un petit rire après ses quelques questions confuses. Il a eu peur de l’offenser en le tutoyant et en lui demandant s’il était un animal. Mais il faut dire que son intervention l’a perturbé, il ne s’était pas attendu à ce qu’on l’interroge sur son ancienne identité. Dans tous les scénarios d’entretiens que lui et Rox ont simulé pour l’entraîner, ça n’est jamais arrivé. Le policier lui répond qu’il est bien né dans ce monde, il a simplement connu d’autres personnes comme lui. L’ancien chiot ne sait pas trop si c’est une bonne chose, car on lui a déjà parlé d’un groupe d’individus malveillants qui n’aiment pas trop les gens comme lui, justement. Mais c’est impossible qu’Auguste en fasse partie, puisqu’il est policier, non ?

Comme il enchaîne sur ses motivations pour devenir maître-chien, Rouky conclut qu’il ne lui veut aucun mal et reprend un peu ses esprits. Il sait pourquoi il est venu jusqu’ici et il est bien décidé à aller jusqu’au bout. Il récite tout ce qu’il a préparé sur son parcours et ses ambitions, sur les raisons qui l’ont poussé à entrer dans les forces de l’ordre et plus particulièrement dans la brigade canine. Le mouvement de tête de son interlocuteur lui laisse penser qu’il ne s’en sort pas trop mal. Cette déduction est confirmée quand celui-ci lui dit qu’il sait se montrer convainquant. Rouky sourit, fier de lui, quand Auguste lui affirme qu’il ne voit pas d’inconvénients à l’embaucher.

Il hoche la tête vivement quand le policier lui explique qu’il lui faudra faire ses preuves. Il réalise que cette gestuelle est bien inutile, puisqu’il ne le voit pas, mais en même temps, il ne voit pas trop comment hocher la tête à voix haute sans interrompre le discours d’Auguste alors il s’en tient plutôt à ne rien dire en attendant la suite. Son sourire retombe un peu quand il mentionne certaines situations difficiles impliquant des chiens. Rouky devait bien l’admettre, en pensant devenir maître-chien, il avait pensé simplement au bonheur que ce serait de dresser les chiens policiers et de les voir à l’action sur une scène de crime - tout ce qu’il avait pu voir à la télévision, en fin de compte. Mais il ne s’était pas imaginé devoir également gérer les cas de maltraitance animale. Son cœur se serre dans sa poitrine ; heureusement qu’Auguste ne peut pas le voir ainsi, il le penserait trop sensible pour ce métier. Pas question de le laisser croire une telle chose ! Il est fait pour ce poste, il en est certain, peu importe les difficultés que cela peut représenter. Cachant le petit coup au moral que les mots d’Auguste lui ont fait subir, il se ressaisit immédiatement quand ce dernier lui demande s’il se sent prêt.

« Bien sûr ! Je veux pouvoir aider, même quand c’est difficile. Surtout quand c’est difficile. C’est dans ces moments-là qu’on a le plus besoin de nous. »

Auguste se lève et incite l’ancien chien de chasse à le suivre dans le couloir. Rouky s’attend à ce qu’il l’amène dans une salle d’entraînement, pour qu’il puisse montrer ce qu’il vaut ; ou peut-être au service de la brigade canine pour rencontrer ses futurs collègues ? Cependant, ça ne semble être ni l’un ni l’autre, puisqu’ils s’arrêtent dans une cour extérieure du commissariat où les attendent un Saint-Bernard. Rouky sourit à pleines dents en le voyant - il ne peut pas s’en empêcher chaque fois qu’il voit un chien - mais d’un autre côté, il a un peu de difficultés à comprendre ce qu’ils font là. Peut-être qu’Auguste veut continuer l’entretien en prenant un café ?

Il obtient finalement réponse à sa question : c’est son premier défi. Il lui suffit de s’entendre avec le chien pour intégrer le commissariat. Rouky sourit. Alors là, c’est un jeu d’enfant ! Lui qui a réussi à apprivoiser ce vieux ronchon de Chef quand il n’était encore qu’un petit chiot, ce n’est certainement pas ce Saint-Bernard qui lui fera peur. Confiant, il s’approche du gros chien et approche sa main pour le caresser. C’est sûrement parce qu’il était l’un d’eux autrefois, mais les chiens se sentent généralement à l’aise en sa présence. Rouky s’accroupit et l’animal le laisse faire quand il entoure sa tête de ses deux bras.

« Comment tu vas, mon beau ? Dis donc, qu’est-ce que t’es grand ! Je suis sûr que tu pourrais même intimider Chef, s’il te voyait. »

Il laisse échapper un rire puis se retire doucement pour laisser le chien respirer. Ce dernier entreprend de lui lécher la main, puis le bras et passe un bon coup de langue sur sa joue qui fait éclater le jeune homme de rire. Une fois qu’il eut fini de l’enrober de salive, le Saint-Bernard se retourne vers Auguste et Rouky sent qu’il est content de le voir. Il risque une observation :

« C’est votre chien, non ? Il vous reconnaît, en tout cas. »

Ça lui semble logique, après tout, c’est plutôt commun pour les personnes non-voyantes d’avoir un chien pour les guider.