Aussi loin que tu t'en souviennes, tu as toujours vécu au Venezuela. Autrefois, tu ne mettais pas de nom à cet endroit, et savait simplement qu'il y avait cette chute d'eau où tu pouvais boire, cette forêt où tu pouvais trouver de quoi te nourrir, et cet espèce de désert qui te permettait de cacher tes trois enfants. Les premiers moments de ta vie étaient futiles à tes yeux, tu te contentais de survivre plus qu'autre chose dans cet environnement hostile et paradisiaque à la fois. Nourrir tes trois oisillons, t'occuper de toi-même... la vie d'un animal ne pouvait pas se trouver être bien palpitante, dans la mesure où ils n'accordent pas de valeurs aux aléas de la vie.

Mais tu as eu le droit à une existence un peu différente des oiseaux de ton espèce. Déjà, il fallait prendre en compte le fait que toi et tes enfants étaient les derniers, que si vous en veniez à mourir, la race s'éteindrait. Mais qu'est ce que tu en avais à faire de faire perdurer l'espèce ? Tu voulais vivre, simplement parce que ton instinct te poussait à faire tout pour. Quand bien même cette horde de chiens te prenaient en chasse sans arrêt, il fallait simplement que tu vives. Pendant de longues années, tu croisas cette organisation canine déterminée tous les jours, et tu fis tout ton possible pour leur échapper. Tu avais beau ignorer ce qu'ils voulaient de toi, il fallait seulement que tu leur file entre les doigts. À force, cela aurait pu devenir un jeu, si seulement tu avais cette notion. Mais les animaux sauvages n'ont pas la notion du jeu, du divertissement, ils survivent plus qu'ils ne vivent, et c'est un fait. Tes journées se sont toujours résumées à courir, mais ça n'était pas comme si tu avais autre chose à faire... et puis il arrive un moment où même être en cavale finit par faire partie de la routine.

Puis un jour, il a fallu qu'ils entrent dans ta vie. Ce gentil petit garçon et ce grincheux vieil homme. Au départ, tu avais juste vu cette chose nouvelle chose, ce carré de chocolat tendu malgré lui par Russell. Comme tout oiseau qui se respecte, tu préféras utiliser ton bec pour tester cette intrigante nouveauté qui s'offrait à toi, et qui s'avéra être bien meilleure que tout ce que tu avais pu goûter jusqu'à présent. Le pauvre garçon, tu as dû bien lui faire peur en te levant aussi brusquement ! Mais il n'eut pas l'air de t'en vouloir, même à cet instant, et ce fut à ce moment que les noms "Dabou" et "Kevin" te parvinrent aux oreilles pour la première fois. Tu n'oublia aucun des deux, car tu leur devais bien ça, à ces joyeux bonshommes. Tu joua un moment avec Russell, qui s'avérait être un personnage Ô combien attachant, et avec qui tu refusa de te séparer. Tu t'ajouta au petit groupe et continua avec eux, quand bien même tu ne les connaissais pas.

Cela ne t'empêcha pas de sauter sur Dug lorsqu'il se présenta devant vous. Ces longues années passées à te faire pourchasser par les canidés t'ont rendue méfiante à leur sujet, et ce fut pour cette raison que tu t'attaqua au pauvre Dug, qui s'avéra, par la suite, être un chien presque aussi attachant que le petit garçon qui lui sauva la mise. Car bien évidemment, si Russell n'avait pas été là, jamais tu ne te serais arrêtée de l'attaquer. Malgré tout, c'est à cause de ce chien au pelage blond que les autres retrouvèrent ta trace. Tu fus contrainte de quitter la joyeuse troupe, pour rejoindre tes oisillons. Cela attrista énormément le pauvre Russell, et toi aussi, bien que ce fut la première fois que tu te liait autant avec des individus autres que ta propre famille.

Puis arriva le moment où la meute trouva les humains. Tu ne sus rien de cela évidemment, et ce ne fut que plus tard que tu retrouvas tes nouveaux amis. Tu les aidas à s'enfuir évidemment, mais te blessa à la jambe dans ta course. Les premiers soins te furent administrés, mais les antagonistes de ton histoire parvinrent à vous retrouver, toi et ta joyeuse bande, forçant pauvre vieil homme à choisir entre toi et sa douce maison. Mais tu ne comprenais pas tout ça à l'époque, aussi intelligente que tu l'étais à cette époque. Tu fus donc emportée loin de tes amis, loin de tes petits, sans réellement comprendre ce qu'il se passait dans ta vie. La nuit que tu enduras fut sans doute la plus effrayante de ta vie, mais tu essaya de rester forte, parce que tu avais de l'espoir à revendre. Tu n'eus pas tort d'attendre, car Dug et Carl arrivèrent pour te libérer de cette cage bien trop étroite pour toi. Tu te mis alors à courir, en suivant ces personnes en qui tu avais une confiance absolue désormais. Tu grimpas au-dessus du dirigeable avec le vieil homme, et le chocolat te sauva la vie ce jour-là, même s'il n'avait pas la même valeur qu'aujourd'hui à tes yeux.

Cet épisode fut éprouvant, mais il te permit de faire connaissance avec un trio d'individus vraiment attachants. Mais ils te laissèrent aux Chutes du Paradis, et tu compris qu'ils devaient partir. Mais, ils te laissèrent de beaux souvenirs qui, malgré ta cervelle d'oiseau, resteront fermement ancrés dans ta mémoire.